The Stranglers. Le clip de « Golden Brown »
« Golden Brown » date de février 1982. Le director en est Lindsey
Clennel. C’est un vidéaste qui avait déjà travaillé avec les Stranglers, pour « No
More Heroes » et « Who
Wants The World ? » en 1980.
On lui doit également deux autres clips de 1982, « La Folie » en mai, et « Strange Little Girl », en août.
« Golden Brown », c’est une drôle de chanson, douce et
langoureuse, un peu perverse : il s’agit d’un hymne indirect, déguisé, à l’une
des substances les plus nocives et pernicieuses qui soit : l’héroïne. C’est
donc une chanson hédoniste de junkie. Or, dans le clip il n’y a aucune
référence à la drogue. On voit les musiciens en égyptologues un peu mous, ce
qui brouille les pistes. Une charge émotionnelle très forte se dégage de cette
mélodie, de la voix suave de Cornwell. On pourrait croire qu’il s’agit d’une
rêverie sur Isis, la déesse-mère. Il n’en est rien. Le texte est volontairement
crypté, codé, énigmatique. « Golden Brown », « Mordoré », c’est la couleur du sphinx, celle du désert,
celle des pyramides, du coucher du soleil. Le soleil aveugle les Stranglers,
déguisés en archéologues des années 30. Les
chameaux, au loin, passent au ralenti. Le clip semble plus abordable que les
paroles. Il paraît même un peu narratif (chose rare) : des égyptologues
ont l'air à la recherche d’un tombeau ou d’un trésor, ou du moins ils sont
outillés pour : on voit une carte, une boussole, un compas, une photo du
sphinx. Comme si le « trésor » était en rapport
avec le sphinx de Gizeh. Hugh Cornwell par son attitude rêveuse et pensive,
détachée, loin de tout, est légèrement valorisé par rapport aux autres
musiciens. Jean-Jacques Burnel joue de la contrebasse en hochant volontairement
la tête. Jet Black se comporte comme un automate qui jouerait de la batterie ou
comme un archéologue qui ne supporterait pas les conditions climatiques, on le
voit s’éponger avec son mouchoir. Il y a pas mal d’humour là-dedans, peut-être
pour contrebalancer le sérieux un peu austère et vaguement malsain des paroles,
volontiers hermétiques. Dans le texte, l’allusion à L’Odyssée d’Homère, à la légende
d’Ulysse attaché au mât pour écouter les sirènes et leur résister, semble
évidente. Mais ici c’est la femme, la sirène, qui est attachée au mât, à la
place de l’ingénieux Ulysse… Bref, les Stranglers ont un certain goût pour
le détournement, voire la mystification.
Les
textures mordorées – non moins que le soleil
Me
laissent à mes rêveries
Qui
voguent tout au long de la nuit
Pas
de combats superflus
Jamais
contrarié avec Mordorée
A
chaque fois comme si c’était la dernière
Sur
son navire, attachée au mât,
Elle
me prend par la main pour de lointaines contrées
Jamais
contrarié avec Mordorée
Modorée,
raffinée, tentatrice
Au
cours des âges met le cap vers l’ouest
Vient
de très loin
Reste
un seul jour
Jamais
contrarié avec Mordorée.
Les Hommes en noir tournent
toujours, même si Cornwell et son rat noir ont depuis longtemps quitté le
navire.
EXTRAIT DE MON OUVRAGE OLD WAVE COLD WAVE NEW WAVE.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire