samedi 1 août 2015

Kate Bush. Hounds of Love. Souvenirs de Mortefontaine.

En 1985, « Hounds Of Love » est un retour aux sources celtiques, comme l’album III de Led Zepp.

« Hounds Of Love » sent l’Irlande, les crépuscules, les feux de bois, les châteaux hantés, les meutes qui traversent les forêts, les lacs sombres et inquiétants. En Ecosse, il n’y a pas que les manoirs qui soient hantés, il y a aussi les lochs, les cieux opaques, les sources sauvages.

L’extraordinaire « Running up that Hill » confirme cette prise en charge du mystère celtique, avec ces percussions très en avant, envoûtantes. « Jig of Life », le B-Side du maxi de Hounds of Love, est une gigue endiablée, avec des « fiddles » écossais. « The Handsome Cabin Boy » semble un traditionnel, mais il est signé KB. On songe au travail des Simple Minds, à l’époque de « Belfast Child ».

« Hounds of Love » est un projet ambitieux. Il comporte une véritable suite celtique. Kate n’a pas hésité à recycler de vieux airs. Mais c’est monnaie courante en Angleterre et aux Etats-Unis, semble-t-il. Il suffit de réarranger une composition anonyme pour pouvoir se l’approprier. Même Bob Dylan a pioché dans le répertoire du passé, sans pour autant se l’approprier.

Souvenirs de Mortefontaine

Au mur, un tableau qu'on aurait dit hanté : une tour rouge qui s'élevait dans un marais grouillant de monstres et de vers. Mon camarade possédait un jeu d'échecs assez bizarre, à sa façon, un peu détourné. Le roi y avait encore moins de pouvoir qu'à l'ordinaire, sorte d'ovin couronné. Hubert s'était investi dans les combinaisons les plus hasardeuses. Il ne me trouvait pas assez intelligent pour être un adversaire à sa hauteur. "Tu es trop mou, trop passif..." me lança-t-il, abandonnant la partie, l'air las. Après-midi pluvieuse. J'étais coincé chez lui. Il m'infligea la triste dictée de Mérimée, avec ses cuissots et ses cuisseaux de veaux et de chevreuils. C'était tout ce qu'il avait trouvé, Hubert, comme distraction, l'humiliation. Je caressais le chat de la maison, malgré son air mauvais. On écouta un disque rayé de Beethoven qui me plaisait bien à cause de la pochette, le tableau de Corot, « Souvenir de Mortefontaine », avec son arbre cérébral. Puis nous refîmes une autre partie d'échecs. "Essaie de te concentrer pour une fois..." me dit Hubert, sympathiquement. Mais son jeu me déconcertait : les fous étaient bossus, aux cavaliers il avait substitué des fées montées sur des ânes. De petites ampoules électriques, restes d'une ancienne guirlande de Noël, remplaçaient certains soldats. On aurait pu facilement s'électrocuter car l'isolation était loin d'être parfaite. Son chat Oswald trônait sur un excellent piano de Prague dont le bois avait été taché par les ronds de verres, les boissons sucrées. Les partitions avaient été rongées par tous les rats de la Rue Saint-Gelais. D'autres avaient été grattées, jugées diaboliques ou injouables par des esprits médiocres. Il s'amusait aussi à faire tourner les tables. Il avait un vieux magnéto, dont il s'était servi pour enregistrer les prestations des ectoplasmes qu'il avait convoqués. Il leur avait même offert l'apéritif. C’était sur ce vieil engin qu’on écoutait « Hounds of Love ». Il s’agissait de la version alternative, mixée par Del Palmer. La batterie, très en avant, comme à l’époque de la mode pirate, d’Adam Ant et de Bow Wow Wow.




Et la voix de la magicienne.




« Hounds of Love » mélange musique celtique et tambours du Burundi. C’est là que l’on sent l’influence de Peter Gabriel, le pendant masculin de Kate Bush.



Extrait d' "Old Wave, Cold Wave, New Wave, Dark Wave", le pavé rock de J. Pintoux, au Camion blanc (éditions).

 

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